On aurait pu penser que les partages réguliers de présentations aux investisseurs permettraient la transmission du savoir, une forme d’éducation ou à minima un retour à la réalité, mais non, alors on va essayer de parler des jeux exclusifs, du marché en 2025 et de ce qu’est une analyse.
Tuto : comment analyser l’industrie du jeu vidéo ?
Alors malheureusement, on ne s’improvise pas analyste économique dans le segment du jeu vidéo. Pas en étant youtubeur ou électricien en tout cas, souvent ça donne des résultats hasardeux. Du coup une analyse, ça se fait dans la durée, en collectant un grand nombre de données qu’on croise, qu’on contextualise, qu’on compare, avant d’émettre des pistes de réflexion et des prédictions/recommandations. C’est pour ça, que les rapports font en général 250 pages, avec des tonnes de sources, et si on en extrait un bout, il est important de comprendre ce qu’on regarde. En l’occurrence, ceux qui suivent parfois mes interventions ne seront pas surpris de constater que la grosse part du jeu vidéo c’est le mobile suivi du PC et des consoles avec une partie assez faible lié au jeu physique.
Alors maintenant c’est important de suivre, quand vous tombez sur les gens pour expliquer que le physique se porte super bien parce que « si on retire le mobile, le pc, les dlcs, les microtransactions finalement ça va, c’est pas si dramatique » , vous faites du déni de réalité, en faisant comme si ce qui comptait pour les éditeurs c’était autre chose que de regarder le marché en face. Si même Nintendo s’est mis au mobile, c’est pas pour rien. Ça ne veut pas dire qu’ils abandonnent leur modèle, mais ils évoluent (d’ailleurs on tape bien des tonnes de DLC sur Mario Kart 8). Tout ça pour dire simplement, qu’on commence une analyse par le marché, et pas par ce qu’on veut lui faire dire. Que ce soit « SONY a raison et c’est la voie à suivre », « les exclus font vendre/pas vendre », « le digital est pas tellement important » etc… Ça permet de comprendre les choses avec recul et pas de chercher un biais de confirmation.
L’impact réel des jeux exclusifs sur console
Alors vous aimez le sang, je sais que les jeux exclusifs ça vous parle, et c’est bien plus complexe qu’une réponse oui ou non. Dans les deux cas les extrêmes sont dans le faux. Petit top des jeux qui génèrent le plus de revenus aux US hors DLC et microtransactions, autant dire que si on les ajoute on remet Fornite, Counter Strike, LOL, DOTA, Roblox et Minecraft en haut tous les ans depuis leurs sorties.Aucun de ces gros jeux n’est un first, tous sont « platform agnostic » , demandez pas pourquoi tous les éditeurs tentent de créer des gros jeux GaaS. Mais surtout on voit qu’en temps de jeu les gros jeux exclusifs et les gros AAA tiers ne représentent qu’une partie infime du temps que les joueurs consacrent à leur loisir.
Du coup je vous réinvite à prendre du recul, quand vous constatez que vous et vos potes jouez à des dizaines de jeux par an parce que ce n’est pas la majorité du marché, qui selon les années et plateformes achète 2-3 jeux par an (toujours les mêmes, notez au passage pour les gens qui m’envoient de l’amour à renfort de « Ubisoft ça fait 10 ans ils font que de la merde » alors qu’on est dans le top 10 depuis un bail ;)) .
Mais pour répondre : Les éléments déclencheurs d’un acte d’achat sont multiples. C’est la base du marketing, on apprend ça au lycée en économie, ou en école de commerce au premier cours… En gros si tu te sapes en NIKE ou que tu es plus PUMA c’est pas uniquement pour la perf. Tu peux aimer la marque, ses valeurs, ce qu’elle représente, la qualité, le design, tu veux faire partie d’un groupe qui utilise NIKE dans ses codes etc.. L’achat d’une console ne déroge pas à la règle, il est donc impossible de rejeter l’impact que des jeux exclusifs ont sur l’acte d’achat. Mais il est niais, à minima, quand on voit le peu de ventes des exclusivités comparativement aux jeux tiers, de conclure que c’est le motif principal, ou le driver exclusif des performances d’une marque ou d’une console, pas en 2025.
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L’exploitation des besoins et des biais cognitifs
Et pour donner quelques maigres exemples, la marque Playstation a su s’imposer à renfort de belles sorties de jeux, de campagne marketing réussies, de communication ciblée (via influenceurs), à ancrer l’idée qu’ils étaient dominant en évinçant des discussions Nintendo, le PC ou le mobile. On a atteint un stade en France qui me rappelle mes jeunes années où Nintendo était le synonyme de console de jeu. On allait chez les amis jouer à la Nintendo peu importe la console, et maintenant c’est Playstation ! Ce que je trouve vraiment fort au passage. Mais pour étoffer, on a aussi le besoin d’appartenance (on se souvient de Maslow), à savoir « mes potes ont une play, je vais me faire salir si j’ai autre chose et/ou je veux rester avec eux pour mes jeux multi ». La fidélité à la marque « J’ai toujours eu des play, jamais déçu, pourquoi je changerai ? » . La nostalgie, l’écosystème avec nos jeux en digital, nos trophées etc…
Je pourrais y aller pendant des heures, vous comprenez le délire, on a beau rationaliser un acte d’achat, c’est l’émotion avant tout. Et l’OVNI Nintendo qui fait la majorité de son catalogue en solo est aussi un bel exemple. L’innovation et l’expérience d’une console, où l’expérience attendue joue énormément. Le concept de la WiiU était étrange et limité, mais le catalogue ! On a Mario Kart 8, Zelda BotW, Xenoblade Chronicle X… Enfin, des jeux exclusifs de qualité qui vendent de ouf sur Switch on en a eu des tonnes, et regardez bien le lancement de la Switch, toute la com qui montrait comment on allait VIVRE la Switch in situ, et pas seulement les titres exclusifs. Désolé pour le pavé les amis, on pourrait en faire encore des heures ou lancer une chaine YouTube. Mais bref…
Vous avez compris que les jeux first et les jeux exclusifs ne sont plus si rentables et impactants que ça, mais on ne peut pas nier qu’ils ont un fort impact psychologique sur une partie des joueurs. Maintenant ce serait bien aussi d’apprendre à doser et nuancer. Je vous ai mis le lien vers les pdf de Take Two.
On aime les jeux first et les exclus qui font briller une console ou un constructeur/catalogue, mais on oublie pas que ce ne sont pas eux la locomotive qui tire toute l’industrie. Ils sont cruciaux au lancement d’une console et dans la communication de départ, puisque les early adopters sont souvent les hardcore gamers les plus engagés, mais plus le temps passe dans le cycle de vie, moins ça impacte le grand public, au détriment de ceux qui continuent la guerre des consoles.
Ici ça joue sur tout depuis toujours avec des cycles où on a eu nos préférences, mais avec le temps, on réalise normalement qu’on est gamer avant tout, et au lieu de mettre de l’énergie à essayer de trouver des datas qui vont nourrir des arguments pour se mettre sur la gueule, vous feriez mieux de laisser ça aux analystes, et de partager ce que personne ne fera mieux que vous. Votre avis sur les jeux, vos coups de cœur, parce qu’on se demande quand on vous voit enchainer drama sur polémique VS prise de bec, si vous éprouvez encore de l’intérêt ou du plaisir pour le JV.
Perso j’ai posé 2 jours pour me faire un marathon de CIV comme quand j’étais ado, j’ai kiffé de me remettre dans ce mindset, et je changerai jamais. Alors la bise, plus de jeu, plus de partage de ce que vous aimez, moins d’attaques et de drama, on vivra mieux 😉
On aurait pu penser que les partages réguliers de présentations aux investisseurs permettraient la transmission du savoir, une forme d'éducation ou à minima un retour à la réalité, mais non. Alors on va essayer, de parler des exclus, du marché en 2025 et de ce qu'est une analyse. pic.twitter.com/rygnR9AFb2
— Aymar Azaïzia (@AymarMtl) February 10, 2025

Fondateur de zeGeeks, rédac’ chef, responsable éditorial, graphiste, monteur vidéo, webmaster… en un mot le « métronome » du média. Reconnu pour accomplir diverses tâches avec sa bite et son couteau (suisse) . La légende dit qu’il serait le fils caché d’Hideo Kojima et d’Akira Toryama.