Pas évident d’aborder la critique du film Les guetteurs d’Ishana Night Shyamalan, même si la jeune réalisatrice s’en sort globalement très bien. Compliqué même de faire abstraction de l’influence de son père tant son emprunte sur le cinéma est forte depuis le début des années 2000.
L’Héritage de M. Night Shyamalan
Vous l’avez compris, il n’est pas facile de succéder à un père cinéaste à la réputation solide, comme M. Night Shyamalan, de par son parcours éclectique dans le cinéma de genre, jusqu’à maintenant. Même si ses derniers films prêtent souvent à des débats controversés (Old et surtout Knock at the Cabin) , non pas sur la forme mais bien plus sur le fond. À noter que le sujet de son nouvel opus Trap (dans les salles en août 2024) s’avère sur le papier tout aussi excitant de par le choix du traitement de l’histoire. Toujours est-il que pour revenir à cette critique du film Les guetteurs, c’est donc sa fille Ishana qui passe cette fois à la réalisation, en adaptant le roman de base The Watchers de A.M Shine. Avec son papa qui s’est donc chargé de le produire. Laissant carte blanche à celle- ci pour œuvrer de son côté, et en faire un produit qui lorgne clairement vers son style de cinéma, avec ses qualités et ses défauts. Et le moins que je puisse dire, c’est que formellement, déjà, c’est très réussi. Unité de temps, de lieu et d’action pour nous emmener vers un récit structuré sur un canevas déjà soigneusement restitué par l’image (photo, cadres et montage…) et de par l’ambiance mystérieuse instaurée dès les vingt premières minutes. qui donne envie d’en savoir plus…
Le temps suspendu
Sans trop en dire dans cette critique, sachez juste que le récit nous conte l’aventure étrange d’une jeune femme qui se perd dans une foret, où le temps semble s’etre arrêté, et tombe sur une sorte de maison aux allures de bunker, dans lequel elle va se retrouver avec trois autres occupants. Ces derniers l’informent d’une situation très insolite. En effet, toutes les nuits, ceux qu’on appellent les guetteurs, les occupants de la forêt en question, les observent sans qu’ils puissent eux-même voir qui ils sont ou ce qu’ils veulent vraiment…
De ce postulat de départ, on a toutes les raisons de croire que le film va nous prendre et nous emmener vers un suspense horrifique qui promet le meilleur. Sauf que là où le bât blesse, c’est que toutes les bonnes intentions affichées au départ tombent rapidement à plat, pour ma part. La faute à une intrigue convenue et sans surprises, dont l’exécution ne surprend à aucun moment, pour s’afficher comme un nouveau maître étalon du genre. Car bien que l’on avance sur un chemin ombrageux, certes plein de mystères, j’y ai vu trop vite les enjeux et la finalité du film. Ici, plus l’intrigue avance, et plus j’y vois les défauts inhérents à ce type d’histoires. Car comment, une fois l’effet de surprise passé, continuer à retenir l’intérêt du spectateur ? Et là, le film fait tout le contraire, à savoir s’étirer en longueur inutile durant les scènes de jour, où les personnages occupent le temps comme ils peuvent, ne pouvant s’échapper de la forêt.
L’un des autres points dommageables du film reste justement les occupants de la maison, stéréotypés pour la plupart, et dont le sort m’a laissé plutôt indifférent. À noter également que les quelques effets horrifiques, distillés çà et là, restent peu effrayants. Le film s’appuyant davantage sur un fantastique de suggestion, donnant l’impression d’un film qui hésite souvent dans sa représentation de la peur, gérée maladroitement dans le moments clés du film. Cependant, autour de cette représentation, je retiens toutefois, une bande sonore, composée par Abel Korzeniowski, envoûtante et oppressante qui accompagne parfaitement les différentes scènes à suspense du film. Les effets sonores sont également bien réalisés et ajoutent une dimension immersive à l’expérience visuelle.
Des intentions louables mais…
C’est sûr, force est de reconnaître que j’ai senti l’influence et l’inspiration paternelle, sur beaucoup de plans à commencer par sa marque de fabrique : le twist. Sans en dire plus, Les guetteurs souffre quand même de nombreux raccourcis scénaristiques, de maladresses et parfois même d’incohérences. Mais cela reste plutôt sympa à voir, car tout n’est pas non plus inintéressant, et donc suffisamment intriguant pour nous maintenir en haleine un minimum. Notamment, de par la tonalité globale qu’Isha Night Shyamalan imprègne au rythme de l’histoire. J’ajouterai que quelques scènes auraient pu bénéficier d’un développement plus approfondi pour renforcer l’impact émotionnel. Bien que certains éléments de l’intrigue puissent sembler prévisibles pour les amateurs de thrillers expérimentés. Donc, si vous êtes là pour de l’horreur pure, dans l’attente d’une réinvention du genre horrifique, vous risquez surement d’être désappointé… Notez bien qu’il s’agit comme je l’ai dit, bien plus d’un film fantastique imprégné d’horreur que le contraire. Son intérêt réside dans son histoire et son concept, pas dans sa manière de vous surprendre ou d’insuffler la peur, car là n’est vraiment pas le point d’orgue.
Conclusion de la critique du film Les guetteurs
Je reste donc assez mitigé, en me disant que je suis toutefois curieux de la suite de la carrière de la fille de Shyamalan, que je considère avec Les guetteurs comme un tour d’échauffement intéressant, ni plus ni moins. Le film divise également beaucoup du côté des spectateurs et cela peut se comprendre. Pour ma part je m’attendais à un film plus horrifique. Celui-ci reste avant tout un conte folklorique avec une conclusion moralisatrice appuyée sur la fin. Un film honnête, sans plus, qui suit la suite des films d’épouvantes et d’horreurs assez convenus, qu’on peut voir régulièrement sur nos écrans (à part quelques exceptions qui sortent clairement du lot, comme La Pieta ou The Seed par exemple) depuis plusieurs années avec des idées qui se recyclent en quelque sorte (même si ici la réalisatrice retient davantage l’attention grâce à sa mise en scène immersive, mais cela ne suffit pas) .
Donc Tel père tel fille, mais la famille Shyamalan semble parti pour nous offrir (je veux bien encore y croire) des œuvres audacieuses, qui pourraient encore nous donner l’espoir d’un renouveau du genre… ou pas. Seul l’avenir le dira.
Passionné de cinéma, séries TV et jeux vidéo.
Avec pour l’illustrer une chaine dédiée et un blog consacré au cinéma de genre international.